La preuve par les victimes. Bilans de guerre en Bosnie-Herzégovine

Par Isabelle Delpla
Français

Résumé

La guerre en Bosnie a été présentée comme le paradigme des « nouvelles guerres » prenant pour cible les populations civiles. Les bilans de victimes deviennent dès lors cruciaux dans l’interprétation de la guerre. Cet article analyse comment les victimes (civiles) deviennent objets de bilans de guerre et moyens de preuves dans un dispositif d’enquêtes et de procès. Il présente d’abord les difficultés générales dans l’établissement de ces bilans : 1) proximité des événements ; 2) multiplicité des institutions nationales et internationales y contribuant et multiplicité de catégorisation des victimes ; 3) dimension internationale du conflit avec présence de forces de l’ONU ; 4) imbrication entre bilans de guerre et d’après-guerre ; 5) et entre bilans de l’après-guerre et de l’avant-guerre (du communisme). Il propose ensuite une comparaison précise du travail du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), pour les crimes commis à Prijedor en 1992 et à Srebrenica en 1995, objets de nombreuses enquêtes et rapports. Cette comparaison manifeste la différence entre modèle des ONG, modèle historien et modèle judiciaire de l’enquête. Elle manifeste aussi des différences significatives dans la contribution des bilans de victimes et des témoignages des victimes (vivantes ou mortes) à l’établissement de la vérité judiciaire. Elle remet en cause les interprétations en termes de « nouvelles guerres » ainsi qu’une interprétation « traditionnelle » de la justice pénale internationale héritée de Nuremberg.

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