Fabrique du genre et sens national dans les organisations de jeunesse chrétienne au Cameroun (années 1940-1950)

Femmes africaines et mobilisations collectives (années 1940-1970)
Par Charlotte Walker-Said
Français

Alors que la littérature scientifique relative à l’Afrique à la fin de l’Empire a tendance à se concentrer sur l’évolution des notions de citoyenneté et des revendications d’inclusion politique nationale dans les années d’après-guerre, le dynamisme et la large influence des Églises chrétiennes dans les territoires africains de la France, surtout au Cameroun, démontrent que les Africains ont aussi exprimé des solidarités avec des communautés situées tant au-dessus qu’au-dessous de l’État-nation. L’histoire du syndicalisme et de l’anticolonialisme politique en Afrique a jusqu’ici négligé les apports de la religion à la fabrication du sens national dans les dernières décennies de l’ère coloniale, et son point de vue a-religieux a échoué à percevoir la façon dont la religion a servi de médiation entre les coûts et les opportunités de la modernité politique et de la souveraineté nationale, sous-tendant de façon cruciale une vie culturelle foisonnante qui donna forme à différentes politiques de masse à la fin de l’Empire. Cet article démontre comment les Africaines au sein des Églises catholique et protestantes au Cameroun ont offert l’image d’une continuité sociale et culturelle dans une période de troubles économiques et politiques, et ont rendu lisible une plate-forme alternative d’expression des droits de l’Homme et de la libération nationale fondée sur celle des partis politiques anticolonialistes. Ce faisant, des Africaines pratiquantes, laïques ou consacrées, ont trouvé leur place dans le cours révolutionnaire du nationalisme en prônant la vision conservatrice d’une société éduquée et pieuse, garante de progrès moral et social, et de décolonisation spirituelle en plus de liberté politique.

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