Un nouveau défi : traiter à égalité féminin et masculin, ou de l'histoire des femmes à l'histoire de « tous les garçons et les filles »

Par Anne-Marie Sohn
Français

Les avancées de l’histoire des femmes ont débouché sur la nécessaire étude de la différence des sexes et des relations entre les hommes et les femmes. L’ambition d’une histoire systématiquement sexuée se heurte, néanmoins, à plusieurs obstacles qui renvoient tous à la distorsion entre les sexes générée par la société elle-même et aux représentations du féminin et du masculin que chacun, homme et femme, utilise, parfois inconsciemment. Les distorsions qui affectent la documentation contrecarrent ainsi l’ambition paritaire. L’histoire des jeunes en est un bon exemple. Les filles restent tout d’abord le point aveugle des sciences sociales des trente glorieuses. La jeune fille n’est pas perçue comme « un jeune travailleur », le travail restant l’apanage idéologique des hommes. Elle est oubliée comme lycéenne à l’heure pourtant de l’explosion scolaire. Elle est, en revanche, assignée à la catégorie « femmes » et supposée partager les valeurs féminines (et éternelles ?) de ses aînées. Lorsque les jeunes parlent d’eux-mêmes, ainsi dans l’enquête lancée par le ministère de la Jeunesse et des Sports en 1966, les mêmes biais affectent leurs discours. Travail rime avec masculin et enfants avec féminin. Les sources interdisent donc une histoire parfaitement paritaire. L’historien, cependant, ne doit pas renoncer à cet objectif, d’autant que la critique à laquelle il doit soumettre les textes permet justement de mieux traquer le féminin et le masculin implicites.

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