Familles de papier : liens épistolaires sous le regard de l’administration pénitentiaire (France, années 1910-années 1930)

Encadrer les liens familiaux
Par Elsa Génard
Français

Cet article cherche à comprendre les effets du cadre carcéral sur le maintien des liens familiaux par voie épistolaire. La réglementation mise en place au cours du xixe siècle définit une liste de membres autorisés à écrire aux détenus. Ce faisant, elle impose des normes familiales qui font primer la parenté légale au détriment d’autres liens plus difficiles à authentifier. Passer du cadre réglementaire à son appropriation par les détenus montre toutefois que maintenir les liens n’est pas qu’une affaire de conformité au règlement. La répartition sexuée des rôles familiaux participe à modeler les relations épistolaires en prison. Les femmes condamnées sont confrontées à une double contrainte. La réprobation sociale née de leur condamnation est plus forte encore que pour les hommes. Mais, en tant que mères, épouses ou sœurs, elles restent en première ligne dans la relation épistolaire. Cette dernière est constamment fragilisée par la situation d’emprisonnement : le contrôle de l’administration fait courir le risque de censure, tandis que la condamnation elle-même transforme l’espace de la lettre en un lieu d’expression, précaire et fragile, d’une communauté de souffrances et d’humiliation par-delà les murs.

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